Salut Vincent

09/03/2012

Cruelle, terrible et injuste, voilà les 3 mots qui définiront à jamais la disparition de Vincent Mellouet, décédé le dimanche 4 mars 2012 alors qu’il était sur l’eau à jouer avec les éléments… Fraîchement arrivé le jour-même d’un trip à Fuerteventura, Vincent voulait s’offrir une dernière session, juste pour le plaisir avant de reprendre le boulot, comme tout le monde lundi.
Comme souvent dans ce type d’accident en mer, les causes de sa disparition restent incertaines. Il y avait une petite marque sur son crâne, peut être un choc sur la tête suivi d’une perte de connaissance et d’une noyade mais les médecins ne sont pas formels, on ne saura jamais vraiment… La seule certitude est que Vincent est définitivement parti et qu’il laisse derrière lui un grand vide.
De nos nombreuses rencontres ces dernières années, quelques instantanés me sont revenus tout au long de cette triste semaine… Je revois encore ce rouquin longiligne sur le lac de Monteynard au milieu des années 90. J’étais "jeune" journaliste chez Wind à l’époque et nous avions l’habitude avec Benjamin Bard de faire des tests matos à "domicile". Vincent nous ayant rapidement "identifié", il nous tournait autour et montrait déjà une bonne maîtrise dans une discipline encore naissante, le freestyle. Le premier à se mettre à l’eau, il était aussi souvent aussi le dernier à en sortir, preuve d’une motivation et d’une passion déjà hors normes.
Et puis les années ont passé, l’adolescent a grandi, pris du coffre, du muscle, de l’assurance et surtout du niveau ! Quand ce n’est pas chez lui en Isère qu’il s’exprimait, c’est à Carro dans les Bouches-du-Rhône que je pouvais régulièrement le croiser, lui qui s’était découvert une vraie passion pour la discipline des vagues. Au fil des saisons, le petit freestyler qui faisait des ronds dans l’eau sur son lac dans les montagnes est devenu un waverider aguerri et respecté et ce sur la plupart des meilleurs spots de vagues français. Un peu plus tard, sa rencontre avec sa compagne Blandine Fort n’a fait que conforté ce statut de garçon talentueux sur l’eau, apprécié et respecté par tous, elle derrière la caméra à immortaliser les sessions, lui sur l’eau, pour au final produire des vidéos souvent simples mais pleines de force et de passion avec la volonté non pas de "s’exhiber" sur le web mais bien de partager. Jovial, pour ne pas dire déconneur, Vincent était aussi profondément humain, une vraie richesse d’âme qui ne laissait personne indifférent…
Parmi les autres instantanés qui me traversent encore l’esprit, je revois Vincent et son compère Matthieu Mercier me parler d’un projet durant le Ventilo Show à Hyères en octobre 2010, une nouvelle marque d’ailerons, ERD Products. C’est une aventure pour le fun car tous les 2 ont un métier mais ils ont déjà une farouche volonté de faire quelque chose de bien et de différent, remettre l’aileron sur le devant de la scène, lui redonner de l’importance, l’offrir ou se l’offrir comme un vrai cadeau pour sa planche avec un packaging spécialement pensé… Les 2 compères m’avaient bluffé, certes la cible était réduite en commençant avec des ailerons de freestyle et pourtant ils avaient déjà de la suite dans les idées. Le beau développement de cette "petite entreprise" l’avait prouvé ces derniers mois et ce printemps, une sérieuse collaboration devait débuter avec Antoine Albeau pour des ailerons de slalom, c’est dire la notoriété et le sérieux acquis en moins de 2 ans à peine.
Et puis il y a notre dernière rencontre à Six-Fours dans le Var en octobre dernier lors de la dernière épreuve AFF de la saison. L’épreuve de vagues à La Badine, un back loop loupé par les juges et une élimination prématurée et injuste… Là où certains auraient fait un véritable esclandre, Vincent Mellouet bouillonnait certes mais restait correct sans un mot plus haut que l’autre. En se quittant en fin de journée, philosophe finalement et acceptant toute l’incertitude et la subjectivité qui règnent toujours lors d’une épreuve de vagues, il m’avait lancé cette phrase qui résonne encore "On fera mieux la prochaine fois !" mais avec un sourire et un rictus qui signifiaient plutôt "Ils vont voir de quel bois je me chauffe sur la prochaine épreuve !".
De prochaine fois il n’y aura malheureusement plus jamais et le windsurf français vient de perdre un garçon simple et attachant à la fois, un vrai passionné comme on en croise trop rarement…