Rencontre avec Team Trégor Production

Nous vous en parlions dernièrement, au travers de notre nouveau correspondant Frédéric Becquart, Windsurfjournal.com s’intéresse désormais un peu plus à la planche à dérive et notamment à la Raceboard et l’Open dont le renouveau semble en marche… Et dans les rubriques passion et originalité, le Team Trégor Production mérite vraiment le détour. Comme on pourrait s’en douter en lisant leur nom, le team est basé en Bretagne à Hennebont (56) et se compose de Nicolas Le Gal, Johann Caffiau et Xavier Grannec. Les 3 acolytes, originaires du même club, la BNIG dans le Trégor, sont très complémentaires puisque Nicolas a évolué à haut niveau en olympisme en équipe de France pendant plusieurs années, Johann, également bon régatier, est engagé dans la mise en œuvre des matériaux composites et Xavier, ancien coureur open  D2, connaît très bien le support.  Leur histoire démarre en 2012 en partant du constat que dans les faibles brises estivales, les planches Open restent royales tout en procurant de bonnes sensations mais que ces dernières ont disparues de la circulation. Rien de mieux qu’un tonneau de 400 litres avec une étrave et une dérive pour filer dans les vents faibles.  L’idée folle de reconstruire une planche avec les techniques et matériaux modernes leur vient donc à l’esprit et ils se lancent d’une page blanche sans aucun repère ! Faire un moule, s’outiller, maîtriser la fabrication sous infusion, se fournir en matière première, il faut du temps et des moyens pour arriver à un vrai résultat. Ils vont y parvenir dans l’excellence, même, en sachant franchir les étapes avec qualité et allant chercher des partenaires spécialistes pour s’entourer. Avant de mettre en avant la performance de leurs nouvelles machines, c’est l’aventure humaine et la gestion de leur projet qu’il faut souligner. WindsurfJournal.com vous fait donc partager cette belle histoire qui n’est pas prête de se terminer.

Windsurfjournal.com : Nicolas, Yohann, Xavier parvenir à faire des planches en freelance, c’est déjà beau mais avec le niveau de fabrication atteint, c’est extraordinaire. Comment avez-vous pu arriver à ce résultat en  conciliant vos vies personnelles et cette activité supplémentaire ?
Nicolas, Yohann et Xavier : C’est vrai que ce projet de fabrication de planches Open nous prend un temps fou : soirées, week-ends, vacances, on ne compte plus nos heures, dès qu’un de nous a du temps libre il fait avancer le projet. Pour infuser notre premier flotteur, ça nous a pris par exemple plus de 30 journées de  travail. S’y on y ajoute l’aménagement de l’atelier, la documentation sur les matériaux et les techniques de fabrication, la construction du moule ou encore la création de notre blog et la recherche de partenaires... je vous laisse imaginer le temps que ça peut nous prendre. Ça peut paraître dingue mais ce n’est que du plaisir, on apprend un nombre de choses incroyables. On ne peut que remercier nos moitiés pour leur patience et leur compréhension.

WJ : Concevoir à 100% une planche, en plus une planche Open avec ses formes si particulières et un puit de dérive, cela exige technicité et outillages de pointe. Comment avez-vous géré ces deux aspects ?
NYX : Chacun de nous a des connaissances et des compétences dans des domaines très variés. On s’est donc réparti le travail. Johann, travaillant dans le composites, s’est naturellement occupé de l’outillage, des matériaux et des techniques de fabrication. On a aussi fait appel à notre entourage et aux copains. Gwen et Florian nous ont ainsi initié à la technique d’infusion, Sylvain nous réalise différentes pièces comme le puit de dérive et Thierry travaille en ce moment à la création de profiles de dérive en 3D. Nos partenaires et fournisseurs nous conseillent également énormément. On s’entoure donc de personnes qualifiées et on apprend au fur et à mesure.

WJ : Un certain nombre de partenaires industriels, très reconnus mêmes, se sont ralliés à votre aventure. Comment se sont faits ces contacts et que vous apportent-ils ?
NYX : C’est extraordinaire tous ces partenaires : Sicomin pour les systèmes Epoxy, Hexcel pour le carbone, AD pour les peintures et consommables, Lefebvre Sails pour les voiles, Karenshop pour les accessoires (housses, straps...) et Coriolis Composites spécialisé dans l’innovation et le placement de fibres. C’est en fait grâce à ce dernier que l’on a pu rentrer en contact avec ce qui se fait de mieux au niveau industriel. Je pense que le côté passion leur a bien plu mais on a aussi fait un gros travail concernant la communication (réseaux sociaux, blog, dossiers partenaires, carte de visites...) pour montrer notre rigueur et notre sérieux. Ce qui est sûr c’est que sans leur soutien, notre projet se serait arrêté depuis bien longtemps. A l’image du temps monstre qu’on y passe, le budget grimpe aussi rapidement. Un grand merci à eux.

WJ : Ce premier challenge gagné, quels sont vos projets sportifs avec ces planches au top ? Prenez-vous  en compte dans vos futurs défis sportifs le renouveau de l’Open que Windsurfjournal.com a récemment présenté et les épreuves s’y associant ?
NYX : On a réussi à sortir une planche de moins de 15 kilos tout équipée, donc oui ce challenge est gagné. Maintenant l’objectif est de rendre la planche encore plus performante. On bosse donc sur la fabrication de nouvelles dérives et sur l’optimisation des voiles Lefebvre. On va bien sûr profiter du renouveau de l’Open avec les nombreuses épreuves qui voient le jour pour se confronter et échanger avec les openistes mais aussi avec les raceboarders. Une participation au championnat du Monde ou d’Europe serait dans ce cadre très enrichissante. Enfin, on souhaite réaliser en 2016 un tour de Bretagne sur nos flotteurs mais aussi en paddle. On a donc un planning bien chargé qui nous attend : fabrication des paddles et pagaies mais aussi recherche de financements et de nouveaux partenaires pour la communication et les équipements de sécurité.

WJ : Produire une planche Open en série, est-ce dans vos projets ? Vous sollicite-t-on pour cela ?
NYX : Un gros travail est réalisé en ce moment pour le renouveau de la classe Open D2, vous en avez parlez dernièrement. Le point noir est évidemment l’absence de production de nouveaux flotteurs. C’est un support très intéressant et méconnu des plus jeunes qui mériterait qu’on s’y intéresse d’avantage. De notre côté, on a reçu de nombreux encouragements et félicitations de la part des pratiquants. Plusieurs d’entre eux nous ont demandé s’il était possible de nous acheter une planche. On est aussi en contact avec un chantier naval qui serait partant pour lancer une série. Y a-t-il réellement une demande aujourd’hui ? Je ne sais pas, c’est un projet qui nécessite un gros travail mais ceci n’est pas d’actualité aujourd’hui pour nous. Dans tous les cas, nous avons une relation privilégiée avec nos partenaires en tant qu’amateurs et passionnés, c’est une chose qu’on ne veut pas perdre.

WJ : Vous vous êtes comportés en vrais chefs de projet, introduire l’aspect business ne vous tente-t-il pas au point de devenir des entrepreneurs ? L’envie d’aller plus loin dans cette voie a dû vous venir à l’esprit.
NYX : C’est une aventure extrêmement enrichissante que nous sommes en train de vivre, autant d’un point de vue humain que technique. On a réussi à trouver plein de petites astuces pour gagner du temps et pour améliorer nos flotteurs par rapport aux anciennes fabrications, tout est fait sur mesure. Il nous reste encore beaucoup de choses à découvrir mais de là à créer une entreprise ? Pour l’instant, tout s’est enchainé naturellement, l’avenir nous le dira.

Source : Frédéric Becquart/Windsurfjournal.com
Photos : Polo - Team Trégor Production - Pierre Jézéquel - Michel Le Gal - Jéronimo Scalabrin