Neil Pryde, l\'interview

11/01/2013

A l’occasion du Nautic à Paris début décembre, c’est une rencontre extrêmement rare que nous avons pu faire avec Neil Pryde en personne, l’homme à qui l’on doit la fameuse marque à la cible mais surtout l’homme d’affaires avisé derrière Pryde Group, une entreprise d’envergure mondiale qui gère les destinées de nombreuses entités dans les sports nautiques. Interview sans concession, sur l’olympisme, le windsurf, le kitesurf et le SUP…

 

Windsurfjournal.com : Revenons tout d’abord à ce qui vous a sans doute le plus occupé en 2012, la décision de l’ISAF en mai dernier d’abandonner le windsurf au profit du kitesurf pour les Jeux Olympiques de Rio en 2016, une décision qui s’est totalement renversée quelques mois plus tard…
Neil Pryde : J’étais présent à Dublin en novembre dernier lors de l’ISAF Annual Conference en tant qu’équipementier avec le support RS:X donc avant tout avec un rôle d’observateur. La décision finale, c’est au travail de l’association de classe RS:X que nous la devons. En mai dernier, c’est évident que nous avons été très surpris par cette décision mais je pense que nous avons fait une erreur en sous-estimant le potentiel du kitesurf et le lobbying de ses supporters. Nous sommes arrivés sans doute un peu trop confiant et l’annonce a été un choc. Tout s’est joué à un vote près mais en même temps c’était un vote très politique car certains votants sont allés à l’encontre des attentes de leur propre fédération. D’un autre côté, cette décision a été aussi provoquée à cause d’un monde de la voile qui se remet en question vis-à-vis des Jeux Olympiques et qui avait besoin d’une image jeune et extrême et la pratique du kitesurf arrivait à point nommé avec sa médiatisation croissante dans les médias. Mais je persiste à penser que cela était une aberration car c’est un sport sans base en réalité. C’est un sport fantastique et un business très profitable mais la pratique n’est pas prête pour les Jeux Olympiques et pour aller plus loin, je pense même qu’elle n’en a pas besoin ! En revanche pour le windsurf, si la décision de mai avait été conservée, cela aurait pu être vraiment préjudiciable pour le sport déjà organisé en partie autour de cet évènement majeur…

 

WJ : Parlons justement du windsurf, de son développement et de son avenir…
NP : De mon point de vue et de celui de ma société, il faut revenir à des choses en connexion avec les clubs sur le principe de la one design ou de la monotypie afin de fédérer une communauté autour de ces supports. La Bic Techno est un fantastique exemple, des milliers de jeunes font du windsurf à travers le monde grâce à cette planche. C’est la plateforme qui mène aux Jeux Olympiques et même s’ils sont peu nombreux au final à représenter leur pays dans l’épreuve ultime, c’est un moteur exceptionnel qui brasse beaucoup de monde. C’est pour cette raison que l’olympisme est important pour le windsurf.

 

WJ : Et quel est votre point de vue concernant le funboard ?
NP : De ce côté-là, c’est plus problématique car il y a moins de structures et d’encadrement pour le sport. La démarche est beaucoup plus individualiste et seuls quelques-uns percent vraiment. La structure sociale n’est pas très développée et pour qu’un sport se développe, il faut qu’une communauté soit organisée autour de quelque chose, ce qui est moins le cas en funboard qu’en Techno par exemple. Si visuellement et en terme de sensations, le funboard est un sport fantastique lui aussi, il est aussi extrême, extrême dans l’image, dans l’approche et dans la technicité, et il attire moins les jeunes. A 20 ans, un jeune généralement veut faire du kitesurf, pas du windsurf, il veut être proche de pratiquants qui ont le même âge que lui ! Philip Köster est un peu l’exception du moment mais, de mon point de vue, le funboard manque d’encadrement et d’accompagnement pour séduire les plus jeunes. Pour se développer et grandir, le windsurf et le funboard en particulier ont besoin de se rapprocher des structures de la voile existantes, des clubs ou des associations, c’est ce qui permettra de structurer justement la pratique dans son ensemble.

 

WJ : Comment faire évoluer et avancer les choses selon vous ?
NP : Il y a encore beaucoup de travail. La première bonne nouvelle, c’est que le windsurf reste finalement olympique et c’est une dynamique dont il faut savoir profiter. Il y a eu une énergie incroyable déployée durant la campagne après la décision du mois de mai dernier et il faut continuer à aller dans ce sens. Je pense que c’est désormais aux différentes classes du windsurf de s’organiser, de devenir plus fortes encore et surtout de créer des passerelles entre elles. Je reviens souvent à l’olympisme mais il est intéressant de voir que c’est un sport qui est en train de se développer dans beaucoup de pays en voie de développement, en Afrique du Nord ou au Moyen Orient ainsi qu’en Asie par exemple, c’est aussi une autre voie à explorer car certains pays découvrent le monde des loisirs.

 

WJ : Pryde Group s’est investi ces dernières années dans le stand up paddle (SUP) avec JP Australia tout d’abord et le rachat dernièrement de la marque Imagine Surf, que vous inspire le développement de ce sport ?
NP : Tout dépend de quel côté on se place ! Le sport en soi est en plein développement, c’est évident mais quand on y regarde de plus près côté business, dans l’industrie du surf, ce ne sont pas les fabricants de planches qui ont gagné de l’argent, c’est l’industrie du surfwear qui en a largement profité ! Et pour moi, une planche de SUP, ce n’est ni plus ni moins qu’un gros surf !!! Côté business, je reste donc perplexe même si nous y croyons beaucoup chez Pryde Group mais en même temps, il faut bien avouer que c’est sans doute la manière la plus amusante et la plus simple d’aller sur l’eau que l’on ait connue ces dernières années…

 

WJ : Pryde Group a lancé en 2012 NP, une marque qui regroupe les entités NPX et NeilPryde Waterwear et qui surfe sur plusieurs disciplines à la fois ainsi que sur la tendance waterman…
NP : Oui cette nouvelle marque vient un peu reprendre l’idée originelle de la société, débuter par le windsurf et se développer au fil des années dans d’autres sports nautiques. Avec la multiplicité des sports, nous avions multiplié les supports et il était logique de tout recentrer autour d’une même entité générique, d’autant plus que les pratiquants passent désormais plus aisément d’un sport à l’autre par rapport à il y a 10 ou 20 ans ! Ça a été un énorme challenge de tout refondre et de changer des habitudes bien ancrées… Je pense que c’est une marque qui est bien dans l’air du temps. Il y a 10 ou 15 ans, on ne faisait que de la planche, que du surf ou que du kitesurf, aujourd’hui, il y a une plus grande transversalité, les gens veulent d’abord passer du temps sur l’eau et c’est pour cette raison que nous voulons les équiper à tout moment !

 

Photos : Pryde Group International

tags: interview Neil Pryde

Articles similaires

Facebook Live - Interview Antoine Albeau

A voir ou à revoir, notre interview Facebook Live réalisée ce vendredi 6...

Facebook Live - Interview Bruno André

A voir ou à revoir, notre interview Facebook Live réalisée ce vendredi 6...

Facebook Live - Interview tridem

A voir ou à revoir, notre interview Facebook Live réalisée ce vendredi 6...
comments powered by Disqus
Gestion de vos données sur le site Windsurfjournal
En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de cookies ou autres traceurs pour vous proposer par exemple, des publicités ciblées adaptées à vos centres d’intérêts ou encore réaliser des statistiques de visites.
En savoir plus fermer