Julien Bontemps, l\'interview

30/03/2012

Vainqueur des RS:X Worlds 2012 à Cadix cette semaine, le français julien Bontemps a incontestablement marqué les esprits et c’est surtout repositionné dans la course à la médaille d’or aux Jeux Olympiques de Londres cet été. Satisfait mais soucieux du long parcours qui reste à accomplir, FRA-6 revient sur cette semaine un peu folle qui récompense aussi un beau travail collectif ! Interview...

Windsurfjournal.com : Après Perth en Australie puis Madère dernièrement où tu n’avais pas eu des résultats satisfaisants à ton goût, avec quel état d’esprit es-tu arrivé à Cadiz pour ces RS:X Worlds 2012 ?
Julien Bontemps : J’étais plutôt déçu au sortir de Madère car je savais que je pouvais faire bien mieux que ça, que j’en étais capable techniquement et mentalement. Je n’ai pas spécialement cherché à modifier beaucoup de choses avant d’arriver à Cadix. Ce que je voulais en arrivant à Cadiz, c’était bien débuter la régate car à chaque fois j’ai tendance à être un peu "mou" et là je ne voulais surtout pas louper la première journée, chose que j’ai fait ! Ces championnats du monde, j’y allais avant tout pour me tester et me prépare au mieux pour les Jeux car c’était la dernière grosse épreuve avant cet été où tout le monde allait se donner au maximum.

WJ : Entre Madère et Cadix, nous avons vraiment le sentiment qu’il y a eu comme un déclic, toi qui faisait plutôt parti des outsiders ces derniers mois ?
JB : Déjà, la première différence entre Madère et Cadix, c’est que j’ai utilisé mon matériel ! A Madère, je voulais me mettre dans une configuration JO avec du matériel donné quelques jours seulement avant la régate. Pour ce Mondial, j’avais décidé de reprendre mon matériel. La stratégie était là un peu différente, tout le monde allait se donner à fond pour la dernière épreuve avant les Jeux et donc prendre son meilleur matériel entre guillemets. Je n’avais donc plus de question à me poser sur le matos et c’est ensuite dans la mise en œuvre réelle en compétition que les choses ont changé. Le niveau n’a pas beaucoup évolué depuis l’an dernier, c’est juste que cette fois, j’ai su mettre en application en compétition ce que je fais le reste du temps en entrainement.

WJ : Tu voulais garder le secret jusqu’à il y a peu, tout du moins vis-à-vis de tes adversaires les plus directs, car tu as un partenaire d’entrainement particulier en la présence d’Antoine Albeau…?
JB : Maintenant que ça marche, on peut en parler ! Dans les conditions que nous avons eu sur ces championnats, notamment les derniers jours, c’est certain que son soutien de ces derniers temps a été précieux. Nous nous sommes entrainés avec du vent plus fort parfois en RS:X avec 40 nœuds à l’anémomètre, et Antoine Albeau, on le sait, quel que soit le support, il va vite ! C’est toujours super intéressant de naviguer avec lui dans les conditions de planing parce que c’est un super lièvre. On se voit de temps en temps, ce n’est pas régulier mais quand on se retrouve, on bosse sérieusement et je ressors à chaque fois de la session d’entrainement rechargé et surtout encore plus en confiance.

WJ : Pour revenir à l’épreuve, de mémoire rarement une épreuve RS:X a été aussi ventée ?
JB : Oui, nous avons eu de l’air toute la semaine, c’était fou. Quelque part j’ai de la chance car je venais vraiment à Cadix pour m’entrainer dans les conditions de planing et finalement, nous n’avons eu que ça. La manche où le vent a été le plus faible, nous avons dû avoir 12-14 nœuds et des manches avec des rafales à 35 nœuds donc vraiment costaud ! C’était intéressant parce qu’à Londres, on peut à la fois avoir des conditions hyper légères en plein été et aussi une dépression en plein mois de juillet ce qui n’est pas rare en Angleterre avec 25 à 30 nœuds.

WJ : Remporter les RS:X Worlds 2012, quelques mois seulement avant les JO, est-ce que ce n’est pas un cadeau empoisonné car ça te replace parmi les favoris et donc l’un des hommes à battre ?
JB : Je sais où je me situe et au contraire, je trouve ça bien car je remets un peu la pression sur mes adversaires. Ces derniers temps, je n’ai pas toujours été très bien placé, entre la 3^ème et la 8^ème place, ce qui n’empêchait pas les autres de m’observer. Là je pense avoir bien marqué le coup sur cette semaine, ma plus mauvaise place est une manche de 6^ème, ça marque les esprits. En ce qui me concerne, ça ne change rien à ma préparation et à ma motivation pour aller chercher une médaille d’or.

WJ : Londres sera ta 3^ème participation aux JO, avec le recul et l’expérience, est-ce quelque chose que tu vas préparer différemment après ce titre ?
JB : Ça ne va surtout rien changer dans ma préparation ! Si j’ai bien marché à Cadix, c’est que je me suis bien préparé avant et il faut donc continuer à aller dans ce sens. A ce sujet d’ailleurs, tout le monde a pu remarquer pendant la semaine que les français ont globalement bien marché, je m’entraîne avec tous depuis un an déjà. Dans une épreuve des JO où la préparation est souvent très individualiste, je suis content de travailler avec un groupe solide en vue de Londres et à voir les résultats des jeunes durant cette semaine, je suis vraiment content ! Je suis beaucoup plus confiant qu’il y a un an et demi, maintenant rien n’est fait et on sait que les JO sont une épreuve à part mais le projet est super, faire progresser les jeunes avec moi, c’est une super satisfaction car c’est la relève, profiter de l’expérience d’Antoine Albeau, j’ai l’impression de vivre un truc de fou en ce moment. La même situation il y a 20 ans en arrière, ça n’existait tout simplement pas !

Photos : Lionel Cottin/FFVoile - Vincenzo Baglione/RS:X Class