Jason Polakow, l\'interview

07/10/2011

Le 12 juillet dernier, l’australien Jason Polakow était le seul windsurfer parmi une horde de surfers à oser dompter la célèbre vague de Cloudbreak à Tavarua dans l’archipel des îles Fidji à l’occasion d’un des plus gros swells de ces 30 dernières années dans le Pacifique Sud… Pour Windsurfjournal.com, KA-1111 revient sur cette session et cette expérience uniques durant laquelle l’australien s’est fait aussi une belle frayeur !

 

Windsurfjournal.com : Comment se prépare-t-on pour anticiper de telles conditions de swell à l’autre bout de la terre ?
Jason Polakow : Depuis pas mal d’années déjà, après avoir décroché du circuit pro, je m’intéresse aux conditions à travers le monde et il y a aujourd’hui beaucoup d’outils sur Internet qui permettent d’anticiper une tempête ou une grosse rentrée de swells. Et puis il y a aussi les contacts, les amis et les connaissances qui vous tiennent régulièrement au courant des bonnes sessions à venir.

 

WJ : Et pour Cloudbreak, comment cela s’est-il passé ?
JP : J’avais répondu au départ à l’invitation de Baptiste Gossein pour venir surfer à Teahupoo sur l’île de Tahiti et puis après quelques jours passés sur place, j’ai vu que les choses bougeaient du côté de Fidji avec 2 gros systèmes qui se rapprochaient de l’archipel après être passé sur l’Australie. Un mois auparavant, j’avais déjà raté une bonne session en raison du meeting importateurs NeilPryde/JP Australie en France et cette fois je voulais vraiment être de la partie ! J’ai donc fait mes bagages, j’ai booké mon billet et je suis parti à Fidji…

 

WJ : Et arrivé sur place, comment cela s’est-il passé ?
JP : Arrivé sur place, j’ai logé dans un hôtel qu’ont des amis, un hôtel situé sur l’île voisine de Namotu, et à peine arrivé, je me suis connecté à Internet et j’ai vu la confirmation des prévisions météo annoncées avec un swell entre 15 et 18 pieds dès le lendemain et qui devait durer pendant 4 jours ! Le matin même, nous sommes arrivés aux premières lueurs du jour et il y avait déjà 10 à 12 pieds, des conditions parfaites qui laissaient présager une belle journée !

 

WJ : Peux-tu nous faire le récit de cette journée du 12 juillet ?
JP : J’ai toujours avec moi en trip mon matériel de windsurf, de surf ainsi qu’une planche pour le surf en tow-in. Comme il n’y avait pas de vent, je suis d’abord parti en surf tow-in et j’ai pris d’entrée de jeu une belle bombe qui m’a mis en confiance… Nous avons été tranquilles et quelques-uns seulement à l’eau à enchaîner des vagues superbes et puis il a commencé à y avoir de plus en plus de monde et notamment des pointures du surf comme Kelly Slater qui, comme moi, avait fait spécialement le déplacement. Au fur et à mesure des minutes, le spot est devenu totalement bondé avec une trentaine de bateaux, des surfers partout à l’eau alors que les vagues continuaient à grossir. Je suis alors devenu spectateur mais aussi acteur en aidant quelques gars en difficulté à l’aide du jet ski. Vers 12h, le vent a commencé à se lever entre 8 et 12 nœuds, guère plus. Le seul souci, c’est qu’il n’était pas side offshore (NDLR : de côté mais légèrement de terre) mais venait plutôt un peu de la mer, des conditions  pas vraiment idéales car avec de la taille, dès que l’on part au take off, il n’y a plus du tout de vent en bas de la vague alors qu’un vent légèrement side off permet toujours d’avoir un peu de puissance. J’ai rapidement compris que seul le jet ski me permettrait de rejoindre le line up. Passé l’appréhension et la nervosité du premier take off sur lequel il fallait être parfaitement placé, j’ai enchaîné ensuite les tours sur de belles bombes…

 

WJ : Jusqu’à cette chute durant laquelle tu t’es fait une belle frayeur ?
JP : Oui en remontant sur la lèvre d’une des vagues, la déferlante a attrapé l’arrière de mon wishbone. Déséquilibré, j’ai compris que ça allait mal se passer et j’ai essayé de me détendre au maximum avant de tomber. Mais en chutant, ma tête a heurté mon gréement ou ma planche, je ne sais pas bien, et je me suis retrouvé sous l’eau, totalement désorienté. Revenu à la surface après de longues secondes, j’ai vu un monstre de 15 pieds arriver de nouveau. J’ai à peine eu le temps de reprendre ma respiration et je repartais déjà dans la lessiveuse. J’ai alors revu le scénario catastrophe de l’an dernier à Jaws. Et puis un gars qui faisait la sécu en jet-ski est venu me sortir de là mais j’ai commencé à paniquer un peu car il y avait du sang partout autour de moi. J’étais complètement sonné, crevé et je ne voyais plus rien de mon œil droit. Ce n’était finalement qu’une ouverture au-dessus de l’œil qui saignait abondamment et après quelques minutes de repos, j’ai décidé d’y retourner. J’étais encore grogui et éreinté par ma chute mais malgré tout je préparais déjà une nouvelle voile car je savais que je m’en voudrais pour toujours si je n’y retournais pas. J’ai finalement navigué jusqu’au coucher du soleil.

 

WJ : Que retient-on de ce type de journée un peu particulière ?
JP : Cette chute, qui aurait pu mal tourner, m’a littéralement transcendé, je ne voulais pas rester sur une note négative et je voulais vraiment y retourner même si sur le coup mes jambes me portaient à peine. Ce genre de journée et notamment lorsque l’on se fait peur, cela rappelle aussi le sens du mot humilité et cela permet de mieux comprendre l’océan et toute sa puissance.

 

Photos : Stuart Gibson - Bruno Lemos

tags: interview Jason Polakow Cloudbreak

Articles similaires

Facebook Live - Interview Antoine Albeau

A voir ou à revoir, notre interview Facebook Live réalisée ce vendredi 6...

Facebook Live - Interview Bruno André

A voir ou à revoir, notre interview Facebook Live réalisée ce vendredi 6...

Facebook Live - Interview tridem

A voir ou à revoir, notre interview Facebook Live réalisée ce vendredi 6...
comments powered by Disqus
Gestion de vos données sur le site Windsurfjournal
En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de cookies ou autres traceurs pour vous proposer par exemple, des publicités ciblées adaptées à vos centres d’intérêts ou encore réaliser des statistiques de visites.
En savoir plus fermer