Anders Bringdal, l\'interview

18/11/2011

Après que les kitesurfers aient définitivement enfoncé le clou l’an dernier en tutoyant les 55 nœuds à Lüderitz en Namibie, on pensait les windsurfers totalement largués dans la discipline avec un compteur à l’arrêt sur 49,09 nœuds depuis 2009 et la performance d’Antoine Albeau sur le canal des Saintes-Maries-de-la-Mer. Mais c’était sans compter sur un Anders Bringdal plus passionné que jamais qui, en participant dernièrement au Lüderitz Speed Challenge 2011, a redonné une vraie lueur d’espoir, la preuve que l’histoire n’est pas encore totalement écrite… Interview !

 

Windsurfjournal.com : Pourquoi avoir décidé de participer, un peu à la dernière minute au Lüderitz Speed Challenge 2011 en Namibie, c’était bien ton second séjour sur place ?
Anders Bringdal : Tout à fait, c’est la seconde fois que je me rendais à Lüderitz après avoir participé à l’épreuve l’an dernier. En fait, mon retour sur place, c’est quelque chose dont nous parlions régulièrement avec Sébastien Cattelan. Mais en raison de mon travail désormais avec Mistral, il m’est très difficile de trouver du temps. Du même coup, je suis toujours un peu on/off sur ce type d’idée et de projet. D’ailleurs j’avais annoncé au départ à Sébastien Cattelan que je ne serai pas présent… Et puis les choses de la vie font que depuis un moment, j’avais en tête d’essayer de réaliser un de ces jours une voile asymétrique avec un côté totalement plat sans pour autant avoir une voile rigide dont la chute ne travaille plus. J’en ai parlé à Gasoil, mon sponsor pour les ailerons, qui s’est tout de suite emparé de 2 de mes gréements Challenger Sails et qui les a modifié. Non seulement, ils sont arrivés à ce que je voulais mais en plus en obtenant au final une voile plus légère. Après avoir testé cette voile sur un spot à côté de Marseille, il est apparu tout de suite évident que cela apportait quelque chose de plus avec notamment plus de contrôle et de vitesse. De mon côté, je voulais aussi vraiment voir à quelle vitesse pouvait aller une pré-production d’une planche Mistral de 42 cm de large et l’idée d’aller à Lüderitz à recommencer rapidement à me travailler. Et puis au final, il y a eu les prévisions météo… Après avoir compris que ça allait marcher, j’ai acheté mon billet d’avion à 2 heures du matin et l’après-midi même j’étais en route pour Lüderitz !

 

WJ : Peux-tu nous parler de ta toute première tentative sur ce canal, qu’est-ce que cela fait de naviguer sur un plan d’eau si étroit ?
AB : En voyant le canal, la première chose qui m’est passée par la tête c’est "Est-ce que ça va être possible de faire quelque chose ?". Au départ, il faut vraiment aller chercher dans ses tripes pour se lancer et j’ai décidé de faire un premier run cool, juste pour voir. La première partie s’est bien passée et puis arrive le virage du canal avec un angle très serré qui ne donne aucun droit à l’erreur. J’y suis allé tranquille et j’ai fait une sorte d’amorce de jibe en me décrochant du harnais. Après 100 mètres, lorsque je me suis senti confortable, je me suis raccroché au harnais et j’y suis allé à fond jusqu’au bout. Au terme de ce tout premier run, j’ai réalisé 44,30 nœuds sur 500 mètres, le suivant, j’étais déjà à plus de 47 nœuds !!! Le temps d’adaptation a été super rapide.

 

WJ : As-tu pensé à un moment à la sécurité, la possibilité de chuter et de te faire très mal ?
AB : Oui, c’est un paramètre que l’on ne peut pas écarter et que l’on a au fond de soi. Mais à la fin de la journée, ce sont surtout les pensées positives qui remplissent l’esprit, la sensation sur le run uniquement. Il y a tout d’abord un facteur important, c’est la confiance dans le matériel. J’utilise des ailerons Gasoil depuis plus d’un an, tout le temps, 12 mois sur 12 et je sais qu’ils ne décrochent pas, c’est déjà un premier élément qui permet d’y aller à fond. Lorsque j’étais sur le canal ensuite, j’essayais de naviguer le plus proche possible du côté au vent, ce qui me laissait ainsi un peu le temps de réagir au cas où. Même si le canal est étroit, il y a aussi beaucoup d’angle entre 143 et 145°, ce qui fait qu’en cas de chute, on a aussi plus de chance de partir dans le sens du canal… En tout cas, c’est ce que je me disais ! Au total, j’ai réalisé 60 runs sur ce canal, dont 37 au-delà des 45 nœuds de moyenne sur 500 mètres, et même si ça peut sembler spectaculaire, ce n’est pas si difficile, ni dangereux. Mais c’est un endroit où l’on ne va pas pour voir si son matériel marche, c’est un canal sur lequel on arrive en connaissant son matériel sur le bout des doigts et pour voir à quelle vitesse on peut aller !

 

WJ : Parlons cette fois de tes temps à Lüderitz, tes moyennes sur 500 mètres ainsi que tes Vmax…
AB : Mes 3 meilleures Vmax sur place sont 50,71, 50,24 et 50,17 nœuds mais il y a surtout cette moyenne sur 500 mètres de 47,44 nœuds. Ce temps me fait penser que j’aurai d’ailleurs pu faire beaucoup mieux. Lors de ces 47,44 nœuds, j’ai eu un bon départ, un peu moins de puissance au milieu du run et une dernière partie vraiment à fond. Si j’avais pu connecter et avoir une bonne rafale au milieu de ce run, je pense que mon temps sur 500 mètres aurait été bien meilleur. Mais le plus important, c’est que j’étais en contrôle à 100% tout le temps, que ce soit en 5.3 ou en 5.7 m². La meilleure rafale que j’ai pu avoir, c’est en 5.7 m² que cela est arrivé alors que c’est pourtant difficile de faire aller une surface pareille à une telle vitesse. Maintenant, j’ai vraiment envie d’avoir les mêmes sensations en 5.3 ou en 4.7 m².

 

WJ : Il y a eu des améliorations apportées sur ce canal lors des 2 périodes ventées, peux-tu nous en parler ?
AB : Oui nous avons coupé l’angle très abrupt au tout début du run, ce qui a permis par la suite de mieux accélérer et avec un meilleur angle. Nous avons aussi aplani le bord du canal au vent et ce pour plusieurs raisons, tout d’abord pour que le vent passe juste au-dessus du canal et crée ainsi moins de clapot mais aussi pour avoir une pente plus douce et moins dangereuse en cas de chute.

 

WJ : Penses-tu que ta participation à ce Lüderitz Speed Challenge cette année va motiver des gars comme Antoine Albeau, Björn Dunkerbeck ou Finian Maynard pour te rejoindre l’année prochaine ?
AB : Ca a déjà motivé pas mal d’autres gars. J’ai réussi à obtenir la première place sur le site Gps-speedsurfing.com avec une moyenne de 48,03 nœuds au GPS et cela a créé énormément d’intérêt. Mais pour répondre plus directement, sans aucun doute, avec des vents entre 50 et 55 nœuds, l’actuel record en windsurf va tomber. Je ne peux parler pour des gars comme Albeau, Dunkerbeck ou Maynard, je ne connais pas leurs motivations mais avec ou sans eux, le record tombera. Il y a plein d’autres windsurfers qui sont capables. Tous les 3 sont de très bons windsurfers mais aucun d’eux n’a eu un plan d’eau aussi plat et venté… Il suffit d’un gars, au bon moment avec la rafale magique et tout peut basculer. Même si le record d’Antoine Albeau est une énorme performance, le canal ce jour-là était très difficile à naviguer, il était capable d’aller beaucoup plus vite si les conditions n’avaient été aussi dures. A moins que quelque chose de nouveau arrive entre temps, le canal de Lüderitz est le seul endroit au monde à présent où quelque chose peut se passer réellement. Après le vent que j’ai pu voir l'année dernière et des rafales jusqu’à 64 nœuds, nous pouvons continuer à naviguer à plat et ça peut nous donner une sérieuse idée de la vitesse à laquelle le windsurf peut vraiment aller. Pour le moment, il est prouvé que les kitesurfers ont plus de contrôle et peuvent donc aller plus vite que nous. Mais s’ils perdent le contrôle parce que le vent est vraiment trop fort ou le plan d’eau trop agité, les windsurfers peuvent revenir. Pour moi, la partie ne fait que commencer !!!

 

Photos : Karine Terrien/Genetrix

tags: interview Anders Bringdal Lüderitz Speed Challenge 2011

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