Alors que débute dans quelques jours le Défi Kite suivi dans la foulée du Défi Wind à Gruissan, nous avons en savoir un peu plus sur les coulisses de cet événement windsurf hors norme. Interview de l’incontournable chez d’orchestre qui mène son événement de main de maître, Philippe Bru !
Windsurfjournal.com : La 18ème édition du Défi Wind débute dans quelques jours... C'est une énorme machine qui te mobilise, ainsi que ton équipe, combien de temps dans l'année au total ?
Philippe Bru : En fait, c’est un peu tout le temps mais plus concrètement, c’est 5 mois vraiment full time côté administration et préparation pour 1 paire de personnes et 2 mois au taquet au niveau logistique, entretien, montage et démontage du site pour 6 personnes. Pendant la production, l’événement lui-même sur 15 jours, c’est plus ou moins 150 à 200 personnes. Pour donner quelques détails en grandes lignes…
L’administration
Elle est devenue compliquée, rigoureuse, contrôlée, précise…Le(s) Défis sont devenus des grosses machines, des événements majeurs tout à la fois pour un territoire (l’Occitanie) et pour la communauté avec le côté international (plus de 40 pays des 5 continents présents, des jeunes de 13 ans à des plus âgés de plus de 70 ans). La règlementation dépasse parfois l’imagination. Il faut être carré avec la Préfecture Maritime pour envoyer plus de 1000 windsurfers affronter la Tram’… Il faut 50 unités nautiques, 150 personnes, 50 bouées, des bateaux médicalisés, des postes de secours, du matériel technique, de la logistique, etc… A terre, un site entier est à créer (nous nous implantons sur un parking vide !). C’est plus de 10.000 m² d’installation (bureaux, médias, lieu de vie, scène, village des marques…) et surtout un apport de flux à sécuriser et là, c’est la Préfecture tout court… Compte tenu de l’ambiance générale tendue (en raison des attentats), ça ne rigole pas… Un organisateur à l’entière responsabilité de tout cela… Cela dépasse donc juste la régate entre copains ! C’est chaud ! Mais c’est aussi une sacrée expérience et une expertise reconnue (25 ans d’event), ça aide… Un détail en passant, la caravane Défi Wind globale, c’est-à-dire les personnes directement liées à l’événement (participants, accompagnateurs, partenaires, exposants, fournisseurs, organisateurs), c’est au total plus de 3500 personnes…
La commercialisation
Un évènement de cette taille coûte cher… Les 2 aspects étant la gestion et sécurisation nautique et la mise en place du site. La billetterie (les inscriptions) est loin de couvrir l’ensemble des frais liés, elle ne couvre même pas l’aspect sportif, le dispositif nautique global et tout le tralala associé. Tu dois donc aller à la pêche… et ce n’est pas dans le milieu windsurf que nous sommes les plus riches… et globalement comme on te "donne" 1/1000 au regard des autres sports "populaires", ça prend un peu de temps. Le territoire (la région, l’agglomération, le département et la ville) reste très impliqué avec un impact économique et une image forts. Heureusement mais … C’est fragile. Allez, jusqu’ici, tout va bien… Enfin presque. C’est quand même serré. Pour visualiser l’affaire … Tu prends le temps investit. Tu le mets en rapport avec 4 jours d’évènement, tu y poses une météo de merde (neige, pluie, froid, ce que tu veux… et c’est dead ! Tu ne vends que du vent ! Les gens n’aiment pas bien en fait ! C’est un Défi !
La technique
Vu plus haut. Un parking vide de plus ou moins 10.000 m² transformé en village "windsurfesque", sans complexes et pour représenter notre sport au même titre que d’autres grands évènements… Des tonnes de bois, de vis, de chargement, de déchargement, de ferraille, de matériel divers et variés, de sueur… Mais on n’organise pas le plus gros évènement de windsurf au monde en racontant juste une belle histoire. On le fait !
Le nautique
Une zone de course de 10 km de large sur 1,5 km de profondeur. 2 territoires (Gruissan – Port-la-Nouvelle), 50 bouées blabla, vu plus haut. Mais derrière ça, 100 radios et bien parler dedans, dispositif de sécu, synchro des moyens techniques et humains, répartition des rôles, des zones, mise en place… C’est un gros dossier.
Les Inscriptions
5 fois plus de d’emails et de coups de téléphones que d’inscrits… Des milliers de lignes Excel (pas que !). Ce n’est pas compliqué, un peu de vérifications quand même, il y a de sacré loulous… Mais ça prend du temps la plaisanterie.
Les emmerdes
Là, on n’a même pas idée !
WJ : Qu'est-ce qui est le plus difficile dans une telle entreprise et aventure, l'avant, le pendant ou l'après... ?
PB : Le plus difficile, c’est juste de savoir si tu vas y arriver ou pas, juste de savoir si tu recommenceras ou pas… Parce que c’est fragile, lourd et compliqué. Parce que l’équipe "cadre" est tellement énorme et expérimentée que le jour où il va y en manquer 1 ou 2, ça suffira pour mettre les mauvais grains de sable aux mauvais endroits. C’est donc la force mais aussi la fragilité de cet événement hors normes. Et que je ne suis rien… sans mes "Hommes et Femmes".
WJ : Cette édition 2018 est un peu particulière avec 2 jours fériés dans la même semaine de l'événement, les 8 et 10 mai, faut-il s'attendre à des surprises particulières et à un vrai "pont" avec le Défi Kite qui aura lieu quelques jours avant ?
PB : Toutes les éditions sont particulières… Nul doute que cette année annonce encore Gruissan et ses "Défis" sont comme "The place to be" pour tous ceux qui partagent sincèrement et avec passion ces énergies incroyables qui nous animent, la glisse, la vitesse et le vent. Et tu vois, c’est ça la clef ! Car on va se faire "bouger" mais dans le bon et même sens que tout le monde… Et par les temps qui courent, c’est juste énorme de vivre ça !!!
Pour en savoir plus sur le Défi Wind : www.defiwind.com
Source : Philippe Bru/Défi Wind
Photos : Dunkerbeck GPS Challenge - Jean-Marc Cornu/Défi Wind - Nico Graziano/Défi Wind